Extraits (Suite)
Le Ventre de Paris (Chapitre 1 - Suite)
Puis, dans ce cadre aimable, létalage montait. Il était posé sur un lit
de fines rognures de papier bleu; par endroits, des feuilles de fougère, délicatement rangées,
changeaient certaines assiettes en bouquets entourés de verdure. C'était un monde de bonnes choses,
de choses fondantes, de choses grasses. D'abord, tout en bas, contre la glace, il y avait une rangée de
pots de rillettes, entremêlés de pots de moutarde. Les jambonneaux désossés venaient
au-dessus, avec leur bonne figure ronde, jaune de chapelure, leur manche terminé par un pompon vert.
Ensuite arrivaient les grands plats : les langues fourrées de Strasbourg, rouges et vernies, saignantes
à côté de la pâleur des saucisses et des pieds de cochon; les boudins, noirs, roulés
comme des couleuvres bonnes filles; les andouilles, empilées, deux à deux, crevant de santé;
les saucissons, pareils à des échines de chantre, dans leur chapes d'argent; les patés, tout
chauds, portant les petits drapeaux de leurs étiquettes; les gros jambons, les grosse pièces de veau
et de porc, glacées, et dont la gelée avait la limpidités de sucre candi. Il y avait encore de
larges terrines au fond desquelles dormaient des viandes et des hachis, dans des lacs de graisse figée.
Entre les assiettes, entre les plats, sur le lit de rognures bleues, se trouvaient jetés des bocaux
d'achards, de coulis, de truffes conservées, des terrines de foie gras, des boîtes moirées de
thon et de sardines.
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Extraits
"...Le Ventre de Paris (1873) est le roman de la nourriture, le roman du combat des gras
et des maigres conçus comme deux peuples biologiques s'affrontant à travers l'histoire sociale et
donnant toujours l'avantage aux gras, aux puissants, à ces "gredins" que sont les honnêtes
gens. Mais ce roman, qui prend pour le cadre les Halles - , alors situées au centre de la capitale, est
aussi l'occasion pour Zola de composer des tableaux de matières, symphonies d'odeurs et de nourritures...."
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