Extraits (Suite)
Au Bonheur des Dames (Chapitre 4)
Lentement, la foule diminuait. Des volées de cloche, à une heure d'intervalle,
avaient déjà sonné les deux premières tables du soir; la troisième allait être
servie, et dans les rayons, peu à peu déserts, il ne restait que des clients attardées, à
qui leur rage de dépenser faisait oublier l'heure. Du dehors ne venaient plus que des roulements des
derniers fiacres, au milieu de la voix empâtée de Paris, un ronflement d'ogre repu, digérant
les toiles et les draps, les soies et les dentelles, dont on le gavait depuis le matin. À
l'intérieur, sous le flamboiement des becs de gaz, qui, brûlant dans le crépuscule, avaient
éclairé les secousses suprêmes de la vente, c'était comme un champ de batailel encore
chaud du massacre des tissus. Les vendeurs, harassés de fatigue, campaient parmi la débâcle de
leurs casiers et de leurs comptoirs, que paraissait avoir saccagés le souffle furieux d'un ouragan. On
longeait avec peine les galeries du rez-de-chaussée, obstruées par la débandade des chaises;
il fallait enjamber, à la ganterie, une barricade de cartons, entassés autour de Mignot; aux
lainages, on ne passait plus du tout, Liénard sommeillait au-dessus d'une mer de pièces, où
des piles restées debout, à moitié détruites, semblaient des maisons dont un fleuve
débordé charrie les ruines; et, plus loin, le blanc avait neigé à terre, on butait contre
des banquises de serviettes, on marchait sue les flocons légers des mouchoirs.
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Extraits
"...De façon plus positive, ce roman (1883) montre la réussite
d'Octave Mouret qui crée un véritable grand magasin ressemblant beaucoup au Bon Marché d'Aristide Boucicaut.
Comme dans le Ventre de Paris où chaque pavillon des Halles avait ses couleurs
et ses matières, chaque rayon sera décrit et entrera dans un vaste tableau abstrait d'étoffes et d'habits
qui est aussi le triomphe d'une nouvelle forme de commerce.
..."
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