Extraits (Suite)

   Le Docteur Pascal (Chapitre 14)

   Quel serait l'enfant ? Elle le regardait, elle tâchait de lui trouver des ressemblance. De son père, certes, il avait le front et les yeux, quelque chose de haut et de solide dans la carrure de la tête. Elle même se reconnaissait en lui, avec sa bouche fine et son menton délicat. Puis, sourdement inquiète, c'étaient les autres qu'elle cherchait, les terribles ascendants, tous ceux qui étaient là, inscrits sur l'arbre, déroulant la pousée des feuilles héréditaires. Était-ce donc à celui-ci, à celui-là, ou à cet autre encore, qu'il ressemblerait ? Et elle se calmait pourtant, elle ne pouvait pas ne pas espérer, tellement son coeur était gonflé de l'éternel espérance. La foi en la vie que le maître avait enracinée en elle la tenait brave, debout, inébranlable. Qu'importaient les misères, les souffrances, les abominations ! La santé était dans l'universel travail, dans la puissance qui féconde et qui enfante. L'oeuvre était bonne, quand il y avait l'enfant, au bout de l'amour. Dès lors, l'espoir se rouvrait, malgré les plaies étalées, le noir tableau des hontes humaines. C'était la vie perpétuée, tentée encore, la vie qu'on ne se lasse pas de croire bonne, puisqu'on la vit avec tant d'acharnement, au milieu de l'injustice et de la douleur.
   Clotilde avait eu un regard involontaire sur l'arbre des ancêtres, déployé près d'elle. Oui ! la menace était là, tant de crimes, tant de boue, parmi tant de larmes et tant de bonté souffrante !

 

Extraits

"...Ce roman (1893) met en perspective le cycle entier et en fait le bilan. Clotilde devient amoureuse de son oncle Pascal qui lui a expliqué l'étude qu'il a entreprise sur sa famille et dont les documents disparaîtront après sa mort. Il ne restera alors que l'arbre généalogique où vient se placer l'enfant que Clotilde a eu de Pascal. Ce passage constitue la dernière page des Rougon-Macquart..."