Affaire Dreyfus
Article du 25 novembre 1897 : ( Suite )
Une vie de cristal, la plus nette, la plus droite. Pas une tare, pas la moindre défaillance. Une même
opinion constamment suivie, sans ambition militante, aboutissant à une haute situation politique, due à l'unique sympathie
respectueuse de ses pairs.
Et pas un rêveur, pas un utopiste. Un industriel, qui a vécu enfermé dans son laboratoire, tout à
des recherches spéciales, sans compter le souci quotidien d'une grande maison de commerce à gouverner.
Et, j'ajoute, une haute situation de fortune. Toutes les richesses, tous les honneurs, tous les bonheurs, le
couronnement d'une belle vie, donnée entière au travail et à la loyauté. Plus un seul désir à formuler,
que celui de finir dignement, dans cette joie et dans ce bon renom.
Voilà donc l'homme. Tous le connaissent, personne ne saurait me démentir. Et voilà l'homme chez
lequel va se jouer le plus tragique, le plus passionant des drames. Un jour, un doute tombe dans son esprit, car ce doute est dans l'air
et il a déjà troublé plus d'une conscience. Un conseil de guerre a condamné, pour crime de trahison, un capitaine, qui
peut-être est innocent. Le châtiment a été effroyable, la dégradation publique, l'internement au loin, toute
l'exécration d'un peuple s'acharnant, achevant le misérable à terre. Et, s'il était innocent, grand Dieu ! quel frisson
d'immense pitié ! quelle horreur froide, à la pensée qu'il n'y aurait pas de réparation possible !
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Premier article
"...Quel drame poignant, et quels personnages superbes ! Devant ces documents, d'une beauté si tragique, que la vie
nous apporte, mon coeur de romancier bondit d'une admiratio passionnée. Je ne connais rien d'une psychologie plus haute.
Mon intention n'est pas de parler de l'affaire...."
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